Dans le cadre du "Mois du dessin" à Paris, la galerie Tarantino présente "Peindre à Rome : tableaux et dessins des XVIIe et XVIIIe siècles". Parmi les oeuvres exposée, un rare dessin de Giovanni Battista Pace sert d'introduction au parcours chronologique. L'oeil de notre journaliste analyse cette feuille publiée pour la première fois dans le cadre de cette exposition, ouverte jusqu'au 21 avril 2011.
La mort de saint Joseph
Giovanni Battista PACE (Rome, 1640 – ?, après 1665)
Sanguine 221 x 157 mm
Provenance : Double Numbering Collector
Annoté à l’encre brune : « 35 » en haut et « trenta cinque » en bas à gauche.
En 1966, le professeur Italo Faldi ressuscitait le nom des Pace en publiant, pour la première fois, plusieurs tableaux de Michele (Rome ?, 1610 - ?, 1670), le père, et de Giovanni Battista, le fils. À ce dernier, le cardinal Flavio Chigi commanda, en 1665, deux scènes d’histoire religieuse : Le Songe de saint Joseph et La fuite en Egypte, qui serviront de point de départ à la reconstitution de son œuvre peinte et dessinée[1]. Celle-ci est encore parfois confondue avec celle de son maître Pier Francesco Mola (Coldrerio, dans le canton du Tessin, 1612 – Rome, 1666) dont il chercha à imiter les sujets et la manière. Leur étroite parenté de style (À la mort de Mola, Giovanni Battista termina certains tableaux de son maître laissés inachevés dans l'atelier) rend parfois difficile la distinction entre les deux. Nous tenons à exprimer notre gratitude à Nicholas Turner à qui nous devons l’attribution de notre dessin à Giovanni Battista Pace.
L’écriture nerveuse est, en effet, celle que l’on retrouve dans ses dessins à la sanguine. De Giovanni Battista Pace, le musée du Louvre possède un Enlèvement des sabines[2] qui présente le même traitement sommaire des visages, des mains et des drapés. Les objets, l’éponge et l’aiguière posées sur la table calée sur le bord droit de la composition, sont esquissés avec la même rapidité que les figures principales.
Le style, en apparence désordonnée, s’accorde avec l’intensité dramatique de la scène. Le dessin est fidèle au récit donné par Jésus de la mort de Joseph : «Du regard, il me priait de ne pas l’abandonner […]. Je posai la main sur son cœur […]. Ses yeux s’emplirent de larmes et il exhala un gémissement profond.» L’expression de Joseph est sans équivoque : il a peur de la mort et il souffre. Son humanité est aussitôt récompensée. Le plafond de la chambre s’ouvre pour laisser place à une nuée d’anges venus accueillir au Paradis le «père nourricier» de Jésus.
La mort de Joseph porte le double numéro d’inventaire du «Double numbering collector», collectionneur anonyme italien de la seconde moitié du XVIIe sicèle, sans doute romain3, qui posséda plusieurs dessins de Giovanni Battista Pace dont celui du Louvre, cité plus haut. Le musée a établi, à partir du fonds des dessins du Comte d’Orsay lui appartenant, que ceux qu’il acheta en Italie et portant la dite numérotation, appartenait à un ensemble de dessins de Pietro da Cortona et d’artistes de son entourage ayant travaillé à Rome et à Florence, tel Ciro Ferri (Rome, 1634 – id., 1689), dont le style graphique est comparable à celui de Mola et de Pace.