On rapporte qu’un pasteur mondain, au xx° siècle, soulignait que Jésus était d’excellente famille, et que ses parents eux-mêmes l’étaient. D’excellente famille juive ! Détail que notre pasteur mondain omettait sans doute dans une période où l’antisémitisme était bien porté.
Alors, oui, Jésus était juif, à 200 % au moins. Mère juive, père adoptif juif, Père juif aussi, archi-juif, car c’est bien du Très Haut, Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, Dieu de Moïse, Dieu de David, qu’il est Fils. Il est donc juif, Fils d’un Dieu très juif.
Voilà pour les origines. Pour l’éducation, le doute n’est pas davantage permis. Il fut circoncis âgé de huit jours et ses parents le présentèrent au Temple quarante jours après sa naissance. À douze ans, sa « fugue » au Temple et sa discussion avec les docteurs de la Loi font figure d’entrée dans la majorité religieuse. Et au commencement de sa vie publique, il exerce le privilège des hommes juifs, qui est de lire la Torah à la synagogue et de la commenter.
Il suffit d’ailleurs d’entendre parler Jésus pour comprendre à quel point il est juif et pétri de la méditation de l’Écriture, normal, oserai-je dire, c’est sa langue paternelle.
Si on saute les étapes, c’est d’ailleurs avec un écriteau le désignant comme roi des Juifs qu’il meut sur la croix.
Au troisième jour, ses disciples, tous juifs, le reconnaissent comme vivant, relevé de la mort, « conformément aux écritures », écritures juives, bien entendu, entendez, la Bible.
Mais ça ne s’arrête pas là, puisque c’est un juif parmi les plus purs, un pharisien nommé Paul qui va « élargir le débat » en s’adressant d’abord aux juifs vivant hors de Palestine, puis aux non-juifs. Dès lors, tous les chrétiens ne sont plus juifs, et tous les juifs ne deviennent pas chrétiens, c’est-à-dire qu’ils ne reconnaissent pas en Jésus le messie que Dieu leur a promis.
Pourquoi sommes-nous devenus frères ennemis ? Terrible mystère que ces longs siècles fratricides. Mystère dont nous, chrétiens, portons sans nul doute la très large responsabilité. Nous avons hélas fait le malheur de nos frères juifs infiniment plus qu’ils n’ont fait le nôtre. Nous avons osé dire ce peuple « déicide » alors que c’est lui qui nous donne le Christ. Nous l’avons accusé de crime alors que par lui, par sa foi et sa fidélité, Dieu vient au monde. Quant à retenir à son égard une culpabilité ! Quel homme, quelle femme peut oser prétendre qu’à Jérusalem en l’an 30, devant le palais de Pilate, le procurateur romain, il n’aurait pas crié : « Crucifie-le » ?
Dieu (et je pèse mes mots) merci, depuis le concile de Vatican II, nous avons renoncé à cette terrible vision accusatoire du peuple juif. Nous avons affirmé (ce que saint Paul avait fait dès l’origine) que les promesses de Dieu sont irrévocables et que l’Alliance que Dieu a conclue avec son peuple est éternelle. Les juifs, sont comme nous, fils et filles de la promesse de Dieu. Comme nous, ils sont dans l’attente. Ils attendent gardant la Loi et gardés par elle. Nous attendons et espérons avec le Christ présent à nos côtés, avec son Esprit dans nos cœurs, heureux somme-nous.
Déclaration du concile de Vatican II Nostra Aetate, paragraphe 4
Du fait d’un si grand patrimoine spirituel, commun aux chrétiens et aux Juifs, le saint Concile veut encourager et recommander la connaissance et l’estime mutuelles, qui naîtront surtout d’études bibliques et théologiques, ainsi que d’un dialogue fraternel. Encore que des autorités juives, avec leurs partisans, aient poussé à la mort du Christ ce qui a été commis durant sa Passion ne peut être imputé ni indistinctement à tous les Juifs vivant alors, ni aux Juifs de notre temps. S’il est vrai que l’Église est le nouveau Peuple de Dieu, les Juifs ne doivent pas, pour autant, être présentés comme réprouvés par Dieu ni maudits, comme si cela découlait de la Sainte Écriture. Que tous donc aient soin, dans la catéchèse et la prédication de la Parole de Dieu, de n’enseigner quoi que ce soit qui ne soit conforme à la vérité de l’Évangile et à l’esprit du Christ.