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9 octobre 2009 5 09 /10 /octobre /2009 14:18
Devant la « crise de la culture » en France, il est de bon ton de désigner un coupable : l’Etat et le Ministère de la Culture. Est-ce si juste ?
Tout d’abord de quelle crise parle-t-on ? L’échec de la politique de démocratisation de la culture ? Le nombre d’artistes, de groupes, de compagnies, le nombre de livres publiés et ceux en recherche d’éditeurs, de spectacles produits ou qui cherchent désespérément à l’être, le nombre de structures culturelles qui se créent chaque année ainsi que la résurgence des maisons socioculturelles, enfin le nombre d’étudiants entrant dans des filières culturelles et d’adultes souhaitant se reconvertir dans ces milieux ne permettent pas de penser que la politique de démocratisation ait totalement échoué. Souvent qualifiées de populistes, les années Lang ont réellement permis à toutes les cultures d’être représentées dans l’offre publique et privée et à des jeunes artistes de tous les milieux et de toutes les sensibilités de pouvoir essayer de vivre de leur art.
Face à cette abondance de l’offre, c’est la pratique culturelle des Français qui est en cause. Même si certaines expositions temporaires ou concerts drainent un large public et offrent des files d’attente immenses propre à réjouir les professionnels désespérés, la fréquentation des théâtres ne s’accroît pas, ni celle générale des musées malgré les bons chiffres d’établissements prestigieux comme le Louvre ou Orsay.
A qui la faute ? Changement de ministère et haro sur celui de l’Education nationale. On n’enseigne pas l’histoire de l’art, de la musique, du théâtre, du cirque et des arts de la rue à l’école. Il est donc normal que les nouvelles générations ne fréquentent plus les lieux culturels. Il sera intéressant d’analyser les effets de la réforme engagée, mais quand on regarde le niveau général des étudiants sortant du baccalauréat en littérature et en histoire (deux matières enseignées) on peut se poser des questions sur la réussite d’une telle réforme. Elle améliorera peut-être la culture générale des jeunes mais pas forcément leur pratique culturelle. L’enseignement du français, de la littérature ou de la philosophie ne semble pas impliquer un fort taux de lecture de romans ou d’essais classiques ou contemporains.
Devant ce déficit de la pratique culturelle, ce sont finalement les établissements culturels qui ont réagi et ont imaginé et mis en œuvre des initiations à la pratique culturelle afin de fidéliser et d’accroître leurs publics. On a vu ainsi fleurir des « écoles des spectateurs ». Le Théâtre national de Chaillot, par exemple, a entrepris depuis six ans un travail pédagogique remarquable. Il offre aux spectateurs, non seulement une initiation concernant le théâtre et la danse, mais également les autres formes de créations artistiques, à travers ses partenariats avec des musées. Le même Théâtre de Chaillot a aussi engagé un partenariat avec le Rectorat de Paris pour « faire » de l’éducation artistique au sein des établissements scolaires. Les exemples sont nombreux et montrent au quotidien qu’il y a des solutions possibles.
Mais au risque de passer pour réactionnaire, force est de constater que le lieu essentiel de la transmission de la pratique culturelle a toujours été la famille. Ce sont les parents qui choisissent d’inscrire les enfants dans les conservatoires pour étudier et pratiquer la musique, la danse ou le théâtre. Ce sont les parents qui accompagnent leurs enfants dans l’apprentissage de la lecture et les poussent à lire leurs premiers romans. Ce sont les parents qui emmènent leurs enfants à leurs premiers concerts et spectacles, du cirque à l’opéra, et les accompagnent des pièces pour enfant aux classiques de Molière, Corneille ou Racine.
Et malheureusement, même dans des familles où les parents ont un haut niveau de pratique culturelle, la transmission n’est pas toujours assumée. Alors bien évidemment, l’Etat qui veille à l’égalité des chances, doit s’assurer que tous les jeunes soient initiés aux pratiques culturelles, mais il ne peut pas se substituer entièrement au rôle d’éducation et de transmission de la famille, il n’en a ni la mission ni les moyens.
Pour les jeunes moins favorisés, les collectivités territoriales, à travers la création de centres socioculturels et par le biais des associations, font par ailleurs un énorme travail de proposition culturelle dans un esprit de proximité et d’adaptation qui les rendent plus efficaces qu’une réforme nationale pleine de bonnes intentions mais sans véritables moyens.
On ne souligne d’ailleurs pas assez le travail remarquable qu’effectuent au quotidien les associations d’éducation populaire pour les arts et la culture. Le maillage associatif est un levier qui devrait être totalement intégré aux réflexions sur la politique culturelle et aux actions à mener. Plus que l’école, le collège ou le lycée, ce sont en effet des lieux efficaces de transmission des pratiques culturelles.
Quant au Ministère de la Culture, si l’on peut regretter qu’il ne prenne pas assez en compte l’ensemble de ces initiatives, on peut néanmoins se réjouir qu’il traite enfin le véritable problème de la crise des publics et des prescripteurs, en faisant fi de la trop vieille rivalité entre public et privé. En signant des conventions avec les principales fédérations et associations d’éducation populaire, l’Etat joue là, pleinement, son rôle d’acteur et de partenaire économique au service, non plus seulement de l’action artistique, mais de sa diffusion et de sa réception. Notamment en préparation de l’Année européenne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale (2010).
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