Il y a des apparitions qui ne posent de problème à personne, ce sont les apparitions du Christ ressuscité à ses apôtres et disciples, après sa crucifixion et sa mort. Elles ne posent pas de problème puisqu’elles sont le critère de la foi chrétienne. Soit on croit le témoignage des apôtres : oui, ils ont vu le Christ ressuscité… et on est chrétien. Soit on ne le croit pas et on n’est pas chrétien. Bien sûr, cela n’empêche pas les spécialistes de discuter de la nature de ces apparitions ; plus ou moins spirituelles, plus ou moins matérielles, mais pour le croyant, ce qui est important, c’est que quelque chose s’est produit, qui a totalement bouleversé ceux qui en furent témoins, et qu’ils furent prêts à mourir pour en témoigner.
D’autres apparitions posent davantage de problème, et tout particulièrement, les apparitions mariales, La Salette, Lourdes, Fatima… et quelques autres. Le schéma est toujours à peu près le même, des enfants, simples et pauvres, voient une dame. Elle leur parle, leur fait même des confidences plus ou moins secrètes. Finalement, la dame révèle aux jeunes voyants qu’elle est la Vierge Marie, demande qu’on prie son Fils, qu’on se convertisse et qu’on construise un sanctuaire. Cet événement fait accourir de grandes foules, on constate des guérisons miraculeuses. L’Église officielle qui a d’abord été réticente, voire hostile, finit par engager sa responsabilité en reconnaissant les apparitions et organisant les pèlerinages et les dévotions.
Que penser de tout cela ? Bizarrement, la Vierge apparaît plus fréquemment au cours du XIX° et XX° siècle qu’auparavant. Plus exactement, avant, elle apparaissait plutôt à des religieux et des religieuses et c’était des visites « personnelles », des sortes « d’ornements », de grâces particulières, reçues dans le cadre d’une intense vie spirituelle.
Au cours des deux derniers siècles, parallèlement au développement du rationalisme et de l’athéisme se déploient les grands sanctuaires mariaux qui affirment haut et fort leur caractère surnaturel.
Certains pensent que la Vierge s’étant émue des progrès de l’incroyance et du matérialisme, a jugé bon de soutenir l’expression de la piété populaire et du sentiment religieux de masse. Bref dans le combat de la Sainte Vierge contre Auguste Comte et Ernest Renan avantage à la Sainte Vierge par K.-O.
En la matière, l’Église est d’une prudence qui l’honore. Les apparitions mariales, même reconnues, même ayant reçu des visites papales ne sont pas article de foi. En d’autres termes, on a le droit de ne pas croire que la Vierge est apparue à Lourdes et être cependant un bon chrétien et même un bon catholique. De la même façon, nul n’est tenu de voir l’intervention divine dans les miracles qui s’y produisent.
Reste la puissante expression d’une piété populaire, une piété d’humbles et de pauvres qui mérite d’être respectée. Reste qu’il faut demeurer attentif aux dérives idolâtriques. L’Église a validé les apparitions mariales chaque fois que Marie tournait les croyants vers Jésus.
Prier aux pieds de Marie, ce n’est pas vénérer une sorte de déesse mère, c’est regarder avec elle Jésus-Christ.
Ce que dit le Magistère catholique :
« L’autorité des révélations privées est substantiellement différente de l’unique révélation publique : cette dernière exige notre foi ; en effet, en elle, par l’intermédiaire de paroles humaines et de la médiation de la communauté vivante de l’Église, Dieu lui-même nous parle… La révélation privée est une aide pour la foi, et elle se manifeste comme crédible précisément parce qu’elle renvoie à l’unique révélation publique ».
« Le Message de Fatima », commentaire théologique du cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. (2000)