Écoutez, c’est une histoire, un roman :
Nous sommes en 2035, dans Jérusalem réconciliée, après de longs et sanglants affrontements. Au cours de la
messe de Pentecôte qui célèbre la paix regagnée, un pape raconte le songe qui l’a bouleversé la nuit précédente : « Je marche sur la route avec quelques compagnons, silencieux et
attristés quand nous sommes rejoints par un voyageur aux mots de feu, et tandis que nous l’écoutons nos cœurs deviennent brûlants de joie. Au bout de la route, nous retenons l’inconnu ‘Reste avec
nous, le soir tombe’. Il accepte, reste pour le repas, prend le pain et le bénit. Nos yeux s’ouvrent, nous le reconnaissons, c’est le Seigneur ! Mais tandis que je me tourne vers mes
compagnons, je découvre la table vide et j’entends la voix douloureuse du Seigneur : ‘Qu’as-tu fait de tes frères’, et je pleure. »
Alors, dans ce midi ruisselant de lumière, devant les télévisions du monde entier, le pape invite tous les responsables religieux chrétiens qui assistent à la célébration à le rejoindre et à
communier avec lui au Corps et au Sang du Christ.
Et tous catholiques, orthodoxes et protestants, célèbrent l’unité et la paix, et reçoivent la Grâce répandue par le Christ, dans sa mort et sa résurrection. En recevant le Corps du Christ, ils
deviennent uns dans le Christ.
J’ai imaginé cette scène, ce geste, pour partager mon rêve et mon espérance avec mes lecteurs. Pour qu’on se dise : « Et pourquoi pas ? ».
Pourtant, cette scène, ici résumée, qui donne le titre au roman ; Vatican 2035, malgré son « énormité », n’a quasiment pas été commentée, comme si ce n’était qu’une anecdote sans importance, un ornement du récit.
Aujourd’hui, je m’interroge encore sur cet étrange silence. Souffrons-nous si peu de la division, y sommes-nous tant « habitués » que nous n’acquiesçons ni n’objectons à cette histoire ?
Alors, je repose ici la question : et si c’était possible ?
Je sais, on m’objectera qu’il ne faut pas « tricher », et faire semblant d’être d’accord alors que l’unité n’est pas réalisée.
Fous que nous sommes, croyons-nous vraiment que nous allons la réaliser nous-même, cette unité, avec la force de nos petits bras, avec nos petits cerveaux et nos cœurs étriqués. Ce n’est pas avec notre intelligence et la précision des mots et des concepts que nous ferons l’unité, mais avec l’humilité de nos cœurs.
Je crois que si nous désirons cette unité, si nous la demandons à Dieu, si nous le supplions sans relâche, si nous avons le cœur brisé de chagrin, alors, il nous sera donné de célébrer en vérité notre unité dans la communion au Corps du Christ.
Je veux continuer à rêver et vous faire rêver avec moi. Si nous sommes catholiques, si nous croyons que l’Eucharistie fait l’Église, si nous croyons que l’Église vit de l’Eucharistie, osons ouvrir notre table à nos frères et sœurs chrétiens séparés, osons croire que nous pouvons demander à Dieu de réaliser lui-même notre unité.