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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 15:09

Le péché a longtemps été la matière première de base du système religieux. Le christianisme, et plus spécifiquement le catholicisme, était passé maître dans l’art d’extraire et de retraiter les péchés, au point que c’était devenu sa principale raison d’être. Résumons les principales étapes de cette industrie autrefois florissante.

Tout d’abord, il fallait repérer les gisements de péchés. Pour ce faire, les puissantes prédications donnant à voir les maux infernaux auxquels seraient soumis ceux et celles qui ne se seraient pas débarrassés à temps de tous leurs péchés étaient extrêmement efficaces. Chacun et chacune s’empressait de retourner ses poches, de vider ses sacs, de tout secouer, ce qui pouvait donner lieu à une confession générale. Ensuite, il était conseillé de faire un entretien régulier et scrupuleux de la conscience, selon une fréquence hebdomadaire ou bi-mensuelle, pour les plus négligents, annuelle. La petite industrie religieuse, appuyés sur ces gisements, pouvait déployer de nombreuses méthodes de recyclage et retraitements, confession, indulgences, pèlerinages, neuvaines. Même la mort des pécheurs n’arrêtait pas l’exploitation puisqu’on disait abondance de messes pour libérer les âmes du Purgatoire. Il va de soi que toute cette activité nécessitait un personnel nombreux.

Et puis, brusquement, l’activité s’est mise à péricliter. Manquait-on de matière première ? Avait-on perdu les secrets de son extraction ?

En fait, la matière première initiale se trouve exploitée par de nouvelles filières. Le sentiment de culpabilité n’a pas disparu, mais il est « laïcisé ». On le traite chez les psy ou on le recycle dans des analyses socio-culturelles.

Question : le sentiment de culpabilité est-il équivalent au sens du péché ? On doit bien convenir que ce n’est pas le cas. En effet, le péché n’est pas une production de notre inconscient, tourmenté par on ne sait quels traumatismes, mais une action ou une omission posées en conscience et qui ne sont pas conformes à ce que Dieu espère de nous.

Le sens du péché suppose d’abord de croire à la haute idée que Dieu a de nous. Dieu nous croit capable du bien. Ensuite, si nous accordons foi à Dieu, nous faisons le constat que nous sommes bien en deçà de ce que nous pourrions être. Nous paressons, nous nous laissons aller, nous ménageons nos petits intérêts, nos privilèges, nos tranquillités. Ce n’est pas tant que nous fassions des choses horribles (même si ça peut arriver), c’est bien plutôt que sommes très loin de faire tout le bien que nous pourrions faire.

La confiance de Dieu pour nous, sa sollicitude, son attention pour ce que nous sommes, en un mot, son amour, précèdent notre péché. Nous sommes pécheurs parce que n’osons pas ou ne voulons pas croire ce que Dieu espère de nous.

Pour tenter de réanimer un système religieux exsangue, et refaire tourner la boutique certains veulent « redonner le sens du péché » et pour cela, sont près à ressortir la menace des lacs de feu et des satans grimaçants. Il me semblerait plus judicieux de redonner le sens du Dieu, d’amour et de pardon révélé ultimement en Jéus-Christ.

 

CEC §386 : Le péché est présent dans l’histoire de l’homme : il serait vain de tenter de l’ignorer ou de donner à cette obscure réalité d’autres noms. Pour essayer de comprendre ce qu’est le péché, il faut d’abord reconnaître le lien profond de l’homme avec Dieu, car en dehors de ce rapport, le mal du péché n’est pas démasqué dans sa véritable identité de refus et d’opposition face à Dieu, tout en continuant à peser sur la vie de l’homme et sur l’histoire. 

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7 février 2012 2 07 /02 /février /2012 10:41

« La Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres », telle est la réponse que Jésus donne aux disciples de Jean le Baptiste qui au nom de leur maître veulent savoir si Jésus est bien le « bon », le « vrai » Messie. Voilà le sceau qui atteste ce qu’il est. Mais ces pauvres, qui sont-ils ? Eh bien, c’est nous, tout simplement, sauf que nous ne le savons pas, pas vraiment. Nous pensons toujours que les pauvres, ce sont les autres, mais sérieusement, qui pourrait oser croire qu’il est riche devant Dieu ? Il faudrait qu’il soit fou. Jésus l’affirme clairement : « Malheur aux riches » - à ceux qui devant Dieu se croient riches - ceux-là seront renvoyés les mains vides parce qu’en fait, ils n’avaient rien (rien qui compte vraiment) et ce qu’ils n’avaient pas, leur illusion de richesse, leur sera retirée. « Car à tout homme qui a, l'on donnera et il aura du surplus ; mais à celui qui n'a pas, on enlèvera ce qu'il a » dit l’évangile selon saint Matthieu au chapitre 25.

Oh, me direz-vous, ça ce sont des jeux de mots. Il y a les vrais pauvres, ceux qui manquent de pain, de toit, de chauffage, d’éducation, de santé, d’avenir pour eux et leurs enfants. Bien sûr ! Il n’y a pas de doute : ces pauvres-là sont le signe terrible de notre iniquité, de notre complicité avec des systèmes qui spolient certains êtres humains du nécessaire pour le superflu de quelques-uns. « Des pauvres, vous en aurez toujours » dit Jésus. Voilà qui est hélas ! vrai. Alors que les biens de ce monde appartiennent légitimement à tous, certains – beaucoup - les détournent et les accumulent à leur profit. Si l’on doit identifier l’un des péchés de ce monde, sans doute celui-là est-il très gros, et aussi très répandu. Voilà sans doute pourquoi la pauvreté volontaire est l’une des voies de la sainteté.

Il reste que le rapport à la pauvreté est l’une des singularités du christianisme : tandis que dans bien des religions, la prospérité est considérée comme une bénédiction de Dieu et la pauvreté comme une malédiction, le christianisme considère que la misère est un fléau que nul ne mérite et qu’il faut le combattre à toute force ; il n’est pas anodin que les systèmes d’assistance, et même l’État provident et redistributif soient nés dans des pays de culture chrétienne.

La proposition chrétienne tient-là, une fois encore, une étrange ligne de crête. Elle nous conduit à combattre la misère sans relâche parce qu’elle est l’une des plus grandes injustices de ce monde, une injustice dont la société humaine se rend collectivement coupable, et elle nous rend la pauvreté choisie désirable car ce sont les pauvres que Dieu comble.

 

CEC : §2444 " L’amour de l’Église pour les pauvres fait partie de sa tradition constante " (CA 57). Il s’inspire de l’Evangile des béatitudes (cf. Lc 6, 20-22), de la pauvreté de Jésus (cf. Mt 8, 20) et de son attention aux pauvres (cf. Mc 12, 41-44). L’amour des pauvres est même un des motifs du devoir de travailler, afin de " pouvoir faire le bien en secourant les nécessiteux " (Ep 4, 28). Il ne s’étend pas seulement à la pauvreté matérielle, mais aussi aux nombreuses formes de pauvreté culturelle et religieuse (cf. CA 57)

 

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30 janvier 2012 1 30 /01 /janvier /2012 13:52

 

Dans le langage commun, une passion est un déploiement de sentiments intenses et violents, et tout bien considéré, le mot convient sans doute mieux qu’il n’y paraît au premier abord pour désigner les heures qui précèdent la mort de Jésus.

Ce qu’on nomme « cycle de la Passion » commence lors de l’entrée de Jésus à Jérusalem, sous les ovations, les cris de joie et l’émotion populaire.

Les évangiles rapportent ensuite diverses prédications de Jésus et des polémiques avec les juifs religieux autour du Temple. Combien de temps cela a-t-il duré ? Quelques jours, quelques semaines, difficile de le dire, mais on voit bien l’atmosphère se tendre et le péril approcher.

La Passion proprement dite, c’est-à-dire les dernières heures de la vie de Jésus ont donné lieu à des récits assez précis dont les quatre évangiles présentent des variantes mais qui proposent cependant une vision très concordante de la poignée d’heures (dix-huit tout au plus) qui sépare le dernier repas du dernier soupir. Voilà des heures qui depuis deux mille ans ont irrésistiblement attiré ceux et celles qui ont voulu connaître Jésus. Pour cet homme, plus que pour tout autre, ces derniers instants sont la clé de compréhension de sa vie tout entière et de sa postérité.

Osons en quelques lignes en tracer les contours. Le dernier soir, Jésus partage un repas avec ses amis. Il sait que ses ennemis sont déterminés, que les heures maintenant lui sont comptées. De chaque attitude, de chaque parole, il fait un testament. Les gestes les plus ordinaires prennent un sens nouveau. Le lavement de pied, simple rite d’accueil devient un manifeste : le service de l’autre est mis au dessus de tout. L’imitation du maître, ce ne sera pas de savoir parler comme lui, mais de savoir se pencher comme lui. Avec le pain et le vin, il arrête le temps pour le rendre éternel. Ce pain dans ses mains, c’est son corps, sa vie donnée. Dans quelques heures, les soldats vont se saisir de lui, mais par avance, il proclame qu’il n’est pas la victime, il est le don et le donateur. On croira venir le prendre, mais lui affirme puissamment par avance qu’il se donne : « ma vie, nul ne la prend, c’est moi qui la donne ». Radicale proclamation de la liberté. Et pourtant, plus tard, dans la nuit, il faudra que la volonté s’offre à la liberté et que la liberté s’offre à la volonté. Mystérieuse nuit qui captiva tant de mystiques. Nuit où Dieu se donne à l’Homme et où l’Homme se donne à Dieu. Don unique, parfait, définitif et éternel. Nul ne se donne dorénavant sans passer par ce don, par Lui, avec Lui et en Lui.

Et quand les torches approchent dans la nuit, commence l’atroce comédie. Les masques abominables et grimaçants de la trahison, de la peur, de la lâcheté et du reniement ricanent autour de l’innocence exposée. Mensonges, faux-témoignages, insultes, injures, appât du gain, veulerie des puissants, vulgarité des foules abjectes et manipulée. Il y a dans cette matinée à Jérusalem une sorte d’effroyable montée en puissance du mal et de l’injustice.

Et puis la croix se dresse, supplice effroyable qui devrait laisser sans voix mais non, les sarcasmes continuent. Il est presque trois heures : « Père pardonne-leur… ». Comment le condamné trouve-t-il ce dernier souffle ? C’est fini, il ne reste plus que cette onde de pardon qui déjà se répand par tout la Terre.

La passion de Jésus-Christ : les quelques heures tragiquement ordinaires d’un supplice comme hélas il s’en déroule quotidiennement, ou victoire définitive de l’amour et de la liberté ? La question est ouverte, la réponse est dans la foi.

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23 janvier 2012 1 23 /01 /janvier /2012 13:08

 

Voilà un mot dont il faut se méfier car il est à double sens. Aussi, si vous l’affichez sur le GPS de votre vie, afin d’être certain de ne pas vous perdre en chemin, prenez garde de donner la bonne adresse. En effet, il suffit d’ouvrir une Bible, qui en la matière devrait faire foi, pour se rendre compte qu’il y a bien un paradis originel, terrestre, et un paradis ultime, céleste. Le premier est un jardin, qui d’ailleurs sous ses dehors paisibles, ne s’est pas révélé sans danger - il s’y traînait des bestioles malfaisantes - , tandis que le second est une ville, la Jérusem céleste.

C’est en deux images indiquer à chaque être humain comme à l’humanité le sens de son itinérance : de la nature à la culture.

On devra en conclure sans hésiter que la nature est certes notre origine mais certainement pas notre destin.

Cette observation est tout sauf anecdotique. La « nature » de l’homme n’est pas d’être le plus naturel possible. Son idéal n’est pas de redevenir un « bon sauvage » mais de devenir un citoyen, un habitant de la cité céleste. Si notre pérégrination sur la terre est une sorte d’apprentissage de la vie céleste, ce n’est pas en nous gardant de la vie ordinaire des hommes et des femmes de notre temps, en pratiquant une sorte de réserve teintée de  misanthropie à l’égard de nos contemporains que nous nous préparons à la vie paradisiaque.

En effet, je ne sais si c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle, mais il semblerait que le paradis ne soit pas une sorte de tête-à-tête (enfin) entre moi et mon Dieu, mais une grande célébration fraternelle, un banquet jubilatoire. Il se pourrait même que la chose ait davantage les accents du banquet de fin des aventures d’Astérix que les belles harmonie d’un concert des Chœurs de la Sixtine. Tant mieux, pour ma part, je ne chante pas très juste, et j’aurais craint de me retrouver baillonné comme Assurancetourix.

La conclusion à tirer de cette observation, c’est que le paradis (le bon) ne se trouve pas derrière nous, dans notre passé, mais devant. La Bible n’omet d’ailleurs, pas de préciser que par précaution, Dieu a posté des « Cherubim » armés de lances de feu afin d’interdire l’accès du jardin initial. En conséquence nos rêves de paradis perdu et d’âge d’or sont des espérance mal orientées, « nul ne retourne dans le ventre de sa mère ». Le paradis est une promesse qui nous appelle depuis l’avenir et c’est dans le vivre ensemble que nous l’expérimentons. C’est pourquoi le chistianisme ne peut pas être seulement une ascèse, un entraînement stoïque où nous apprendrions à nous passer de tout et de tous, où nous renoncerions à tout, à tous, et à nous-même pour n’être qu’à Dieu, n’en déplaise à certaines dérives sprituelles.

Rien de ce qui nous rapproche de Dieu ne peut nous séparer de nos frères et sœurs humains. Il n’est certes pas inutile de nous libérer des esclavages que génère le désir de possession. Mais si nous nous détachon des choses, c’est pour mieux nous attacher à ceux et celles qui nous entourent et avec qui nous avons promesse de vie commune.

 

CEC, §1027 : Ce mystère de communion bienheureuse avec Dieu et avec tous ceux qui sont dans le Christ dépasse toute compréhension et toute représentation. L’Écriture nous en parle en images : vie, lumière, paix, festin de noces, vin du royaume, maison du Père, Jérusalem céleste, paradis : " Ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme, tout ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment " (1 Co 2, 9). 

 

Et pour les fans de saint Thomas d’Aquin, une citation d’Aristote, véritable confession de fois pré-chrétienne 

 L’homme est un animal politique.

« Aussi l'homme est-il un animal politique, plus social que les abeilles et autres animaux qui vivent ensemble. Et la nature, qui ne fait rien en vain, n'a départi qu'à lui seul le don de la parole, qu'il ne faut pas confondre avec les sons de la voix. Ceux-ci ne sont que l'expression de sensations agréables ou désagréables dont les autres animaux sont, comme nous, susceptibles. La nature leur a donné un organe borné à ce seul effet ; mais nous avons de plus, sinon la connaissance développée, au moins tout le sentiment obscur du bien et du mal, de l'utile et du nuisible, du juste et de l'injuste, objets pour la manifestation desquels nous a été principalement accordé l'organe de la parole. C'est ce commerce de la parole qui est le lien de toute société domestique et civile.

 

100 mots pour la foi

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22 janvier 2012 7 22 /01 /janvier /2012 12:55

 

Jésus appelle et les deux couples de frères aussitôt le suivent. Sans dialogue, sans demande d’explication, sans même poser la question de qui est cet homme. Pourtant nous sommes au tout début de l’Evangile et il est loin d’être certain que Simon, André, Jacques et  Jean aient déjà entendu parler de Jésus. Encore moins qu’ils soient persuadés que cet homme est un lien quelconque avec leur Dieu. Il n’est même pas certain que sur les quatre, l’un d’entre eux soit un homme particulièrement pieux. Jésus ne va pas pêcher au Temple, mais au bord d’un lac. Il ne choisit pas des érudits de Dieu mais des pêcheurs.

 

Aussitôt, ils le suivirent, laissant là leurs filets, symboles de leur métier, de ce qui les fait vivre. Aussitôt, comme les gens de Ninive qui croient en entendant la parole de Dieu transmise par Jonas. Jonas parcourt Ninive, Jésus passe près du lac. La parole de Dieu circule, elle n’est pas statique, elle vient à l’homme. La parole de Dieu replace l’homme face au temps, sa principale limite. « Encore quarante jours, et Ninive sera détruite ! », « Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle. » La réponse des hommes se fait en acte et non en parole, elle s’accomplit dans un présent immédiat. La Parole de Dieu transforme directement l’homme qui l’entend. La Parole de Dieu arrache l’homme à la contingence du temps, à la contingence du raisonnement, de la discussion, de l’avoir, de tout ce qui nous permet d’avoir un semblant d’emprise sur nos vies d’êtres finis. Elle nous place directement dans la Vie de Dieu, dans la communion à la Vie éternelle de Dieu.

 

Se convertir n’est pas un long chemin de privations et d’efforts, se convertir c’est accepter de se dessaisir de nos peurs et de tout le vain travail de nos vies qui nous sert à les surmonter ou à les oublier pour accueillir la Bonne Nouvelle qui nous est annoncée. La conversion se vit non dans le présent que nous nous construisons pour conjurer le passé et l’avenir de nos vies mais dans l’immédiateté de Dieu qui fait de nous des êtres vivants. « Le monde tel que nous le voyons passe », le présent tel que nous nous le construisons passe. Mais la vie que Dieu nous donne, elle, est sans limite, le présent que Dieu nous offre est sans finitude, sans peur.

 

La Parole de Dieu nous libère en nous donnant la vie, elle nous installe dans une relation vivifiante avec Dieu, dans une communion que la mort même ne peut vaincre. Se convertir c’est nous abandonner à la vie qui vient à nous, aussitôt nous serons libérés du fardeau que nous nous construisions. Tout coule, tout passe, l’amour de Dieu et sa promesse demeurent.  

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20 janvier 2012 5 20 /01 /janvier /2012 16:36

 

Robert Scholtus, après dix années passées à Paris, rentre dans la ville de Metz qui l’a façonné. Des dîners de la capitale, il semble avoir gardé cette maladie à la mode au nom anglo-saxon, le name-dropping, qui consiste à placer un maximum de noms connus dans une conversation. Est-ce comme la pratique des citations, qu’il affectionne, un palliatif à la timidité ? Bien évidemment, l’exercice littéraire et la finesse de l’auteur transforment la litanie des people à la mode en celles d’écrivains, peintres, et personnages historiques, pour certains méconnus, au commerce plus agréable. Les souvenirs et la vie intérieure de celui qui est tout à la fois le héros et l’auteur de Promesse d’une ville sont façonnés par les références culturelles. Véritable musée vivant, elles l’aident à marcher sur la passerelle, ce présent narré, qui, dans les premières pages de l’ouvrage, le mène de la gare au nouveau Centre Pompidou-Metz.

L’auteur tutoie le héros dans une intime distanciation. Il entraine le lecteur dans sa vision intérieure, le rendant présent dans ses analyses, le faisant marcher comme un ami entendant remonter dans le silence de celui qu’il accompagne les souvenirs qui l’ont nourri dont certains semblent parvenir aujourd’hui seulement au stade du conscient. Promesse d’une ville, finesse d’une vie.

La passerelle que nous empruntons au travers de ces pages a des airs de passage inter-sidéral permettant des ouvertures éclaires entre des espaces mémoriaux bien différents où s’entremêlent architectures, histoire, écrivains et peintres, souvenirs d’enfance et, de temps en temps, mais finalement souvent, tels les blancs de Rubens qui venaient parachever et révéler ses œuvres, une pensée de l’auteur où une confession intime.

L’histoire, l’architecture, l’urbanisme et les personnages célèbres de Metz s’égrènent au fil des pages tandis que prend chair l’auteur-héros. Paris et les dix années de concubinages qu’il a vécu avec la capitale viennent s’immiscer dans la relation qu’il renoue avec la Pucelle abandonnée. Il l’appréhende avec le double regard de l’enfant  et de l’homme expérimenté. Un double regard qui peut peut-être expliquer la finale paradoxale de l’ouvrage où un événement aux résonnances intimes vient finalement anéantir la précieuse construction de l’ouvrage, replongeant la promesse d’une ville dans une froide distance.    

 

 

 

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Promesse d’une ville

Robert Scholtus

Arléa. 2011. 15 euros.

Date de parution : 2 février 2012

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17 janvier 2012 2 17 /01 /janvier /2012 01:06

 

S’il est un mot chrétien entre tous, c’est bien celui-là. Rien n’est plus spécifiquement chrétien que le pardon. Rien n’est plus difficile à croire, rien n’est plus difficile à vivre. Et l’expérience montre qu’il est aussi difficile de pardonner que d’être pardonné.

Évidemment, l’on me dira que ce qui est la particularité du Dieu des chrétiens, c’est qu’il est Amour, et c’est vrai mais le pardon est l’expression la plus parfaite et la plus concrète de l’amour. Le pardon est l’amour en acte.

Jésus dans l’épisode bien connu du paralytique demande à la foule qui s’étonne qu’il puisse pardonner les péchés du malade : « Qu’est-ce qui est le plus facile ? Dire à cet homme “tes péchés sont pardonnés ou lève-toi et marche ?” » Et joignant la preuve à la parole, Jésus donne l’ordre à l’homme paralysé de prendre son brancard et de rentrer chez lui, et l’homme se lève et marche.

Bizarrement, dans l’Évangile, il n’y a pas de réponse à la question que pose Jésus. Elle est toujours posée : « Qu’est-ce qui est le plus facile ? »

Et le paradoxe, c’est que nous croyons beaucoup plus aisément que les paralysés marchent et que les aveugles voient plutôt que de croire que nos péchés sont remis. Et comme nous ne croyons pas que nos péchés sont vraiment remis, vraiment effacés, nous ne croyons pas non plus que nous pouvons pardonner, nous aussi.

Le véritable cœur du christianisme est le pardon et nous l’avons grimé en religion du péché. Nous avons fait de Dieu un juge, un comptable, un soupeseur d’âme. Nous avons imaginé des additions sordides de péchés véniels se transformant en péchés mortels. Nous avons même inventé des tables de change pour racheter les péchés à grand renfort d’indulgences.

La classification des péchés, et leur tarification ont occupé et occupent encore de nombreux théologiens.

Et dans tout ça, ou est passé le pardon ? Oh, il est au coffre, sous clé, sous bonne garde et sous condition ! Parce qu’on ne sait jamais, si on le laissait en libre-service, sans doute, beaucoup en abuseraient-ils !

Mais c’est justement cela le pardon, c’est un don qui surpasse tout. Ce n’est pas un troc: un repentir contre un pardon. Regardez le paralytique, il n’a rien demandé, il ne s’est repenti de rien. Il est pardonné, tout simplement, gratuitement. Et Jésus sur la croix, a-t-il attendu un geste, un regret de la part de ses bourreaux, de ceux qui l’insultaient, des amis qui avaient fui ? « Père pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ».

Est-ce que nous entendons cette phrase ? Est-ce que nous la croyons ? Est-ce que nous en vivons ? Si nous avions le bonheur de croire vraiment en notre pardon, absolu, total, inconditionnel, sans doute serions-nous nous aussi capable de pardonner.

Pardonner et accepter d’être pardonné, c’est tout l’enjeu de notre foi.

« Qu’est-ce qui est le plus facile ? »

 

En lisant le Catéchisme de l’Église catholique :

Puisque j’ai parlé de comptabilité je vais en faire un peu. Dans le Catéchisme de l’Église catholique on trouve 77 occurrences du mot "pardon", avouez, que le hasard fait bien les choses, presque une perfection, comme les 70 fois 7 fois qui est le nombre de fois où il faut pardonner selon Jésus. Mais par curiosité, j’ai noté le nombre d’occurrences du mot "péché", est là, on trouve 230 occurrences. Les chiffres sont terribles, ne trouvez-vous pas ?

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15 janvier 2012 7 15 /01 /janvier /2012 23:22

 

Les textes de ce dimanche nous parlent de vocations, celles du jeune Samuel et des trois premiers disciples de Jésus. Leurs points communs sont un dialogue entre Dieu et l’appelé ainsi que la présence d’un médiateur, Eli pour Samuel, Jean-Baptiste pour les disciples. Des médiateurs qui permettent aux hommes appelés de reconnaître Dieu.

 

Dans la suite des évangiles, Jésus ne va cesser de dialoguer avec les hommes et les femmes qu’il rencontre. La figure du médiateur ne sera plus présente et ce rôle ne sera pas pris par le Christ qui ne se présente généralement pas comme étant Dieu. Et pourtant, quand le Christ s’adresse aux hommes, une question, celle qu’il pose à ses disciples (Mc 8,27) « Et vous, que dites-vous ? Pour vous, qui suis-je ? », devient centrale, toujours présente à l’intérieur du dialogue.

 

Cette question qui nous est posée personnellement fait de chacun d’entre nous notre propre médiateur. Notre conscience est la seule à pouvoir nous faire reconnaître celui qui nous parle comme étant le Dieu de Samuel, le Messie des disciples. Certes, les Ecritures, l’Eglise, nos frères et nos sœurs peuvent nous y aider, mais au final, c’est nous seuls, dans notre propre liberté, qui pouvons répondre : « Me voici » et adresser cette réponse à Celui que nous reconnaissons comme Dieu.

 

C’est pourquoi vocation et conversion sont intimement liées. Finalement nous ne pouvons reconnaître que nous sommes appelés par Dieu (vocation) si nous n’acceptons pas que la voix qui nous appelle est celle de Dieu (conversion). La véritable conversion n’est pas un ensemble de changements d’attitudes, faire le bien plutôt que faire le mal, mais un changement radical de vision de ce qu’est notre propre vie : une vie à l’écoute de notre vie (qui n’est pas forcément mauvaise) ou une vie en dialogue avec celui que nous reconnaissons comme Dieu. Sans faire de mauvais jeu de mots, une vie qui ne soit pas solitaire mais une vie à deux ou à Dieu.

 

La fraternité que nous sommes appelés à vivre, n’est pas une fraternité que nous devons apprendre à vivre dans un effort de conversion mais une fraternité qui nous fait vivre dans l’unique conversion qu’est l’acceptation de vivre avec cet autre qui nous appelle, Dieu qui s’est fait frère en Jésus-Christ. Accepter comme Samuel que Dieu soit avec nous et accepter comme les disciples de rester auprès de Jésus, c’est entrer dans une fraternité qui fait vivre.

 

Ni la vocation, ni la conversion ne nous entrainent dans une sortie de nous-mêmes qui nous mènerait vers une vie éthérée proche de Dieu. Au contraire, comme le dit Paul, elles nous resituent justement dans notre corps, temple de l’Esprit. Un corps qui trouve sa plénitude non pas dans le retrait du monde mais bien dans l’accueil de l’autre.

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10 janvier 2012 2 10 /01 /janvier /2012 00:36

 

 

À partir de ce simple mot, on pourrait réécrire toute la théologie chrétienne. On est là au centre de la foi, dans le cœur du réacteur. On pourrait d’ailleurs filer la métaphore et dire qu’en effet de Pâques émane une énergie inépuisable qui transfigure tout ce qu’elle touche. Mais que dire de Pâques en quelques mots ? Prenons les choses par leur petit angle. Pourquoi le mot passe-t-il du pluriel au singulier quand la fête juive de Pessah devient les Pâques chrétiennes ? Les linguistes pensent que la fête juive est la mémoire d’un fait, la libération de Hébreux de l’esclavage d’Égypte et leur passage à la liberté, tandis que les Pâques chrétiennes font mémoire du dernier repas de Jésus partagé avec ses disciples, de sa Passion, de sa mort, de sa résurrection, de son entrée dans la vie définitive, et de la promesse de notre propre salut…

Je ne suis pas certain que la démonstration soit bien convaincante. Dans les deux cas, il y a une richesse et une pluralité des significations. Pourtant, entre les deux épisodes, celui où les Hébreux réussissent à échapper à la servitude d’Égypte et traversent le mer à pieds secs devant les armées de Pharaon et l’épisode la Passion du Christ, il y a une immense différence. Dans le premier cas, pour sauver ce peuple que Dieu, selon les Écritures nomme « Israël, mon fils premier-né », le bras du Seigneur s’abat sur Pharaon et ses armées : tout va bien qui finit bien, les méchants sont punis.

Dans la Passion du Christ, c’est tout l’inverse, l’innocent, le Fils Unique, est condamné, et les « méchants », au lieu d’être punis sont pardonnés et sauvés.

Dieu n’a pas balayé l’humanité qui ne l’a pas reconnu, ni les responsables religieux obtus, tatillons et jaloux, ni la foule versatile et irresponsable, ni les amis couards, renégats, traitres, ni la soldatesque cruelle, ni Pilate, le païen ignoble et injuste qui condamne l’innocent en toute connaissance de cause.

Dans cette affaire, nul n’est condamné, tous sont coupables et tous pardonnés, tous sont innocentés. Depuis Pâques, ce que nous avons à reconnaître devant Dieu n’est pas d’être coupables mais d’être innocentés. Ce qui resplendit à Pâques et irradie le monde, c’est la miséricorde de Dieu, son amour absolu, inconditionnel.

Accepterons-nous de croire cela, pour nous-même pour nos frères et nos sœurs humains ? Tel est le véritable enjeu de notre foi.

 

CEC §655 : Enfin, la Résurrection du Christ – et le Christ ressuscité lui-même – est principe et source de notre résurrection future : " Le Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui se sont endormis (...), de même que tous meurent en Adam, tous aussi revivront dans le Christ " (1 Co 15, 20-22). Dans l’attente de cet accomplissement, le Christ ressuscité vit dans le cœur de ses fidèles. En Lui les chrétiens " goûtent aux forces du monde à venir " (He 6, 5) et leur vie est entraînée par le Christ au sein de la vie divine (cf. Col 3, 1-3) " afin qu’ils ne vivent plus pour eux-mêmes mais pour Celui qui est mort et ressuscité pour eux " (2 Co 5, 15).

 

100 mots pour la foi

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8 janvier 2012 7 08 /01 /janvier /2012 13:18

 

Quelque soit le statut de ce texte de Matthieu, mythe ou récit, ce qui le rend fascinant ce sont ses acteurs de nature si diverse. Par ordre d’entrée en scène : Jésus, les mages, le peuple de Jérusalem, Hérode, tous les chefs des prêtres et tous les scribes, l’Ecriture, l’étoile, le songe. A cette longue liste, il faut également ajouter trois couples qui structurent le texte : la certitude et l’inquiétude ainsi que la manifestation publique et le secret et enfin le don et la peur de perdre ses possessions.

 

Profusion d’acteurs et pourtant une certaine simplicité, une trop grande simplicité même, manichéenne, opposant les bons mages au méchant Hérode. Récit ou mythe, comment un lecteur sérieux (et comme lecteur également acteur de ce récit) peut-il recevoir intelligemment cet événement inaugural qui ouvre en quelques lignes à l’ensemble du drame de l’Evangile, celui du choix.

 

Car l’épiphanie que nous fêtons est contenue dans la première phrase du récit. Ce que nous fêtons, mais avant tout ce que nous recevons dans ce récit c’est Jésus apparaissant à la surface de la terre, et donc comme l’a longtemps considérée la tradition un déploiement en quelque sorte de la fête de Noël. Manifestation à la surface de la terre, inscription dans la géographie et le temps de l’homme, nous pourrions même aller jusqu’à dire intrusion provoquante de Dieu dans notre univers. En fait, à mon sens, nous fêtons à Noël au sens strict l’épiphanie du Seigneur et nous fêtons avec le récit des mages et d’Hérode l’épiphanie du Seigneur comme interpellation de l’homme qui devient être (homme ou femme) devant Jésus.

 

C’est bien le surgissement de l’événement Jésus qui provoque la joie de la certitude des mages et l’inquiétude d’Hérode et du peuple de Jérusalem. L’inquiétude d’un événement qui dépasse ceux qui en reçoivent l’annonce. Une inquiétude qui n’est pas négative en soi suivant qu’elle se nourrit de la crainte joyeuse de Dieu ou de la crainte peureuse de Dieu. Une inquiétude qui, pour les hommes qui vivent dans une histoire sainte, vient naturellement questionner les Ecritures qui résonnent avec l’événement annoncé.

 

Face à l’interpellation de l’homme qu’est cette manifestation, c’est donc pour le lecteur comme pour les contemporains de Jésus la question du choix qui se pose. Un choix radical que sous-tend le manichéisme apparent du récit même si nos choix ne sont jamais radicalement des paradigmes purs. Nous ne sommes ni Hérode, ni les mages et notre vie ne sera en permanence ni l’enchainement inquiétude, secret, repli sur soi et mort ni celui certitude, témoignage public, don et vie. Mais les réalités de nos vies, y compris nos errements et nos parts d’ombre, peuvent être éclairées de notre choix radical, celui de répondre à l’interpellation de Jésus qui se manifeste à nous en lui donnant notre foi en le reconnaissant comme l’événement qui oriente nos vies.

 


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